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Politique et institutions | Le 22 juillet 2025, par Raphaël Deuff. Temps de lecture : dix minutes.


La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires

Texte de l’Union européenne sur la diversité culturelle

Convention européenne visant à protéger et promouvoir les langues employées par des minorités traditionnelles, la Charte impose aux États signataires des obligations concrètes pour favoriser l’usage de ces langues dans tous les domaines de la vie publique et privée.


La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires vise à « la sauvegarde du patrimoine linguistique européen » : sur le Vieux Continent, plus d’une soixantaines de langues répondent à la définition de « langues régionales ou minoritaires » établie par cette convention. Adoptée le 25 juin 1992 par le Comité des Ministres (l’instance de décision du Conseil de l’Europe) et ouverte à la signature le 5 novembre suivant à Strasbourg, la Charte des langues régionales ou minoritaires entrée en vigueur le 1er mars 1998.

Vingt-cinq pays de l’Union européenne sont actuellement parties de la Charte. Malgré plusieurs débats parlementaires (notamment en 2014 autour d’un amendement constitutionnel), la France, au reste signataire de la Charte, n’a pas à ce jour ratifié le texte conformément à une décision du Conseil constitutionnel rendu le 15 juin 1999, déclarant contraires à la Constitution certaines des dispositions du texte.

Les pays ayant actuellement ratifié la Charte sont : l’Allemagne (1998), l’Arménie (2002), l’Autriche (2001), la Bosnie-Herzégovine (2010), Chypre (2002), la Croatie (1997), le Danemark (2000), l’Espagne (2001), la Finlande (1994), la Hongrie (1995), le Liechtenstein (1997), le Luxembourg (2005), le Monténégro (2006), la Norvège (1993), les Pays-Bas (1996), la Pologne (2009), la République slovaque (2001), la République tchèque (2006), la Roumanie (2008), le Royaume-Uni (2001), la Serbie (2006), la Slovénie (2000), la Suède (2000), la Suisse (1997) et l’Ukraine (2005).

Promotion active des langues minoritaires

Centrale dans la politique européenne de protection des minorités, la Charte a été élaborée à partir d’un texte proposé par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, l’instance de démocratie locale de l’Europe. Elle peut être rapprochée de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, qui s’attache quant à elle aux droits des personnes.

Le suivi de la Charte est assuré par un comité d’experts indépendants qui veille à sa mise en œuvre effective. L’originalité du texte réside dans son approche volontariste. Le texte impose aux États l’ayant ratifié une promotion active des langues minoritaires. Les parties doivent ainsi favoriser l’utilisation et le maintient de ces langues dans l’enseignement, la justice, l’administration publique, les médias, la culture, la vie économique et sociale, ainsi que dans la coopération transfrontalière.

Cette promotion vise « à compléter les droits individuels des locuteurs de langues minoritaires ».

La Charte évite par ailleurs prudemment d’envisager les relations entre langues officielles et langues minoritaires en termes de concurrence ou de conflit, et défend l’idée d’un partage de la légitimité linguistique au sein de chaque configuration nationale - selon l’un des principes du texte, le développement des langues minoritaires ne doit ainsi pas entraver la connaissance et la promotion des langues officielles.

Langues régionales et langues « sans territoire » : la diversité linguistique en Europe

Le champ d’application de la Charte concerne spécifiquement les langues régionales ou minoritaires, définies comme les langues pratiquées traditionnellement sur le territoire d’un État par des ressortissants constituant un groupe numériquement inférieur au reste de la population. Pour un État donné, la liste de ces langues exclut la ou les langues officielles du pays.

La convention s’applique aussi aux langues dépourvues de territoire : cette notion complexe vise en particulier les langues de diaspora qui ne sont officiellement employées dans aucun pays ; c’est le cas de l’arménien occidental (langue de la diaspora arménienne), du rromani ou du yiddish, mais aussi, pour la France, des langues berbères du Maghreb, bien qu’elles soient aujourd’hui reconnues comme langues officielles en Algérie ou au Maroc.

Sont par contre exclues du champ d’application du texte, les langues de migration récentes (c’est-à-dire des langues n’étant pas « traditionnellement employées par un groupe minoritaire sur une longue période à l’intérieur d’un pays », dimension parfois délicate à définir), ou encore les dialectes des langues officielles (comme les dialectes de l’allemand standard en Allemagne, ou les nombreux dialectes régionaux italiens).

L’Allemagne connaît ainsi sur son territoire des locuteurs du danois, du bas sorabe et du rromani. L’Autriche abrite pour sa part des communautés parlant le croate du Burgenland, le hongrois et le slovène. En Espagne, la diversité linguistique est particulièrement notable avec des langues minoritaires comme le basque, le catalan, le galicien et l’occitan. La Pologne reconnaît des minorités linguistiques telles que le kachoube, le lemkovien et le rromani, tandis que le Royaume-Uni protège des langues celtiques insulaires comme le cornique, l’irlandais et le gaélique d’Écosse. Signataire de la Charte, la France n’a pas à ce jour ratifié le texte, jugé contraire à la Constitution.

Les langues protégées par la Charte dans chaque pays

Allemagne : Danois, Bas allemand, Bas sorabe, Frison septentrional, Romani, Frison du Saterland, Haut sorabe.

Arménie : Assyrien, Allemand, Grec, Kurde, Russe, Ukrainien, Yézidi.

Autriche : Croate du Burgenland, Tchèque, Hongrois, Romani, Slovaque, Slovène.

Bosnie Herzégovine : Albanais, Tchèque, Allemand, Hongrois, Italien, Ladino, Polonais, Romani, Roumain, Ruthène, Slovaque, Slovène, Turc, Ukrainien, Yiddish.

Chypre : Arménien, Arabe maronite de Chypre.

Croatie : Tchèque, Allemand, Hongrois, Roumain boyash, Istro-roumain, Italien, Ruthène, Serbe, Slovaque, Slovène, Ukrainien.

Danemark : Allemand.

Espagne : Amazigh, Aragonais, Asturien, Basque, Catalan, Darija, Estrémadurien, Fala, Galicien, Léonais, Occitan, Portugais.

Finlande : Sâme d’Inari, Carélien, Sâme du nord, Romani, Russe, Sâme de Skolt, Suédois, Tatar, Yiddish.

Hongrie : Arménien, Béas, Bulgare, Croate, Allemand, Grec, Polonais, Romani, Roumain, Ruthène, Serbe, Slovaque, Slovène, Ukrainien.

Monténégro : Albanais, Bosniaque, Croate, Romani.

Norvège : Kven/Finnois, Sâme de Lule, Sâme du nord, Romanes, Romani, Sâme du sud.

Pays-Bas : Frison, Limbourgeois, Bas Saxon, Papiamento/Papiamentu, Romani, Yiddish.

Pologne : Arménien, Belarusse, Tchèque, Allemand, Karaïme, Kachoube, Lemkovien, Lituanien, Romani.

Russie : Slovaque, Tatar, Ukrainien, Yiddish.

République tchèque : Croate de Moravie, Allemand, Polonais, Romani, Slovaque.

Roumanie : Albanais, Arménien, Bulgare, Croate, Tchèque, Allemand, Grec, Hongrois, Italien, Macédonien, Polonais, Romani, Russe, Ruthène, Serbe, Slovaque, Tatar, Turc, Ukrainien, Yiddish.

Royaume-Uni : Cornique, Irlandais, Gaélique mannois, Ecossais, Gaélique d’Ecosse, Ecossais d’Ulster, Gallois.

Serbie : Albanais, Bosniaque, Bulgare, Bunjevac, Croate, Tchèque, Allemand, Hongrois, Macédonien, Romani, Roumain, Ruthène, Slovaque, Ukrainien, Valaque.

Slovaquie : Bulgare, Croate, Tchèque, Allemand, Hongrois, Polonais, Romani, Russe, Ruthène, Serbe, Ukrainien, Yiddish.

Slovénie : Croate, Allemand, Hongrois, Italien, Romani, Serbe.

Suède : Finnois, Sâme de Lule, Meänkieli, Sâme du nord, Romani, Sâme du sud, Yiddish.

Suisse : Français, Francoprovençal, Allemand, Italien, Romanche, Yéniche.

Ukraine : Bélarusse, Bulgare, Tatar de Crimée, Gagaouze, Allemand, Grec, Hongrois, Karaïme, Krymchak, Moldove, Polonais, Romani, Roumain, Russe, Ruthène, Slovaque, Yiddish.


Raphaël Deuff


Ressources bibliographiques

Ressource : Charte européenne des langues (coe.int)

régionales ou minoritaires

Ressource : Texte de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (coe.int)

Ressource : La patrimonialisation des langues (minorées) : une voie (obligatoire) vers le marché ? (shs.cairn.info)

Ressource : L’enseignement des langues régionales [PDF] (vie-publique.fr)

Ressource : Langues régionales, minoritaires et de la migration (coe.int)

Ressource : Scolarisation bilingue et appropriation d’une langue (minoritaire) (revue-tdfle.fr)

Ressource : À propos des « langues minoritaires » et des groupes qui les parlent (journals.openedition.org)

Ressource : La place de la langue minoritaire dans les identités collectives (shs.hal.science)

Ressource : Langues minoritaires, langues minorées, langues minorisées ou langues en situation minoritaire ? Essai de définitions et de mises en situation (oskar-bordeaux.fr)


Entités nommées fréquentes : Charte, Allemagne, France, Romani, Tchèque, Allemand, Hongrois, Slovaque, Slovène, Ukrainien, Roumain, Ruthène, Sâme, Yiddish, Arménien, Polonais, Albanais, Croate, Grec, Italien, Russe, Serbe, Tatar, Bulgare.


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